Les aliments gras sont mauvais et nous devons les éviter, n’est-ce pas ? Pas nécessairement, affirment les scientifiques.
Selon des données récentes, tout dépend du type d’aliment (1). Si certains aliments riches en graisses saturées sont associés à un risque accru de maladies cardiaques et de diabète, d’autres vont à l’encontre de cette tendance. Il s’agit notamment de certains produits laitiers, la consommation de yaourt étant même associée à une réduction du risque de ces maladies mortelles.
Certains aliments riches en graisses n’ont pas les effets attendus
Les maladies cardiovasculaires (MCV) et les accidents vasculaires cérébraux restent la principale cause de décès en Europe. Par ailleurs, le nombre de personnes atteintes de diabète de type 2 (DT2) continue de grimper en flèche.
Les experts ont longtemps estimé que les acides gras saturés (AGS) présents dans notre alimentation étaient en partie responsables du bilan alarmant de ces maladies. Les recommandations nutritionnelles conseillent de limiter les aliments riches en AGS, pouvant être associés à une augmentation du cholestérol et des risques de thrombose. Cela peut alors impliquer de diminuer la consommation de certains de nos aliments préférés, y compris les produits laitiers, qui constituent l’une des principales sources d’AGS dans les régimes alimentaires occidentaux.
Cependant, les scientifiques remettent aujourd’hui en question l’idée reçue selon laquelle tous les aliments contenant des AGS sont à limiter. En effet, pour les produits laitiers du moins, les études n’ont pas permis de mettre en évidence une association significative entre leur consommation et le risque de maladies cardiovasculaires ou de diabète de type 2. Aujourd’hui, des preuves apparaissent afin d’expliquer les raisons pour lesquelles les produits laitiers n’ont pas les effets escomptés.
Les consommateurs réguliers de yaourt ont un risque réduit de diabète
Dans une récente revue d’études cliniques, les chercheurs ont trouvé des preuves solides que la consommation régulière de yaourt est associée à un risque réduit de DT2. En revanche, la consommation de fromages semble n’avoir aucun effet ou un effet négatif sur le risque de DT2 (2).
En effet, une analyse de sept études cliniques sur les produits laitiers fermentés a montré que la consommation de yaourt était associée à une réduction de 27 % du risque de DT2. Cependant, dans trois de ces études, la consommation de fromage était associée à une augmentation de 24 % du risque de DT2 (3).
La consommation de produits laitiers n’est pas associée à un risque accru de MCV
Des études cliniques récentes ont également montré que l’augmentation de la quantité de produits laitiers consommée n’est pas associée à un danger pour notre santé cardiaque.
Une grande étude a ainsi examiné la consommation de produits laitiers et le risque de MCV chez plus de 100 000 personnes âgées de 35 à 70 ans et réparties sur cinq continents. Au terme de 9 ans de suivi, l’étude a révélé que la consommation de plus de deux portions quotidiennes de produits laitiers était associée à un risque de décès par MCV inférieur de 23% et à un risque d’événements MCV majeurs (crise cardiaque ou accident vasculaire cérébral) inférieur de 22% par rapport à une absence de consommation de produits laitiers(4).
Dans cette étude, une consommation plus importante de lait et de yaourt, mais pas de fromage, a été associée à une réduction du risque de maladies et de décès liés aux MCV.
Les effets des acides gras saturés peuvent dépendre de la source alimentaire
Les recherches les plus récentes suggèrent que ces risques pour la santé sont influencés par l’aliment qui fournit les AGS. Une analyse de plus de 100 études cliniques a révélé que la consommation de viande rouge et de viande transformée était associée à un risque accru de maladie coronarienne, d’insuffisance cardiaque et d’accident vasculaire cérébral, alors qu’aucune association de ce type n’a été observée avec la consommation de produits laitiers(5).
Les scientifiques ne parviennent pas encore à comprendre pourquoi ces différences existent, mais ils soupçonnent plusieurs mécanismes d’être à l’œuvre :
- La matrice des produits laitiers pourrait jouer un rôle clé – la structure physique d’un aliment spécifique et la façon dont ses molécules interagissent peuvent modifier les effets des nutriments en influençant la façon dont nous les digérons et les absorbons à partir de l’aliment. Cela peut se traduire par une réduction de l’absorption des graisses(6).
- Les acides gras saturés peuvent stimuler le « bon » et le « mauvais » cholestérol, de sorte que les effets bénéfiques du cholestérol HDL contrebalancent les effets néfastes du cholestérol LDL.
- Les acides gras saturés présents dans les produits laitiers ont tendance à augmenter les grosses particules de cholestérol, qui sont moins associées au risque de maladie cardiovasculaire que les petites particules.
- Les protéines contenues dans les produits laitiers ont un effet hypotenseur, ce qui peut contribuer à contrebalancer l’augmentation du risque de MCV due aux acides gras saturés.
- Les cultures vivantes de ferments présentes dans les produits laitiers fermentés tels que le yaourt peuvent également contribuer à leurs effets bénéfiques sur le risque de MCV et de DT2.
« Globalement, les produits laitiers ont une association neutre ou bénéfique avec les maladies cardiovasculaires et le DT2. Des associations bénéfiques sont observées pour la tension artérielle et la réduction du risque de DT2 liée à la consommation de yaourt ». – Givens DI, 2023
Pour en savoir plus : lire l’article original.
Source : (1) Givens DI. Aliments laitiers et maladies cardiométaboliques : une mise à jour et une réévaluation de l’impact des AGS. Proc Nutr Soc. 2023 Feb 6:1-17.
Références supplémentaires :
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Guo J, Givens DI, Astrup A et al. (2019) The impact of dairy products in the development of type 2 diabetes: where does the evidence stand in 2019? Adv Nutr 10, 1066–1075.
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Companys J, Pla-Pagà L, Calderón-Pérez L et al. (2020) Fermented dairy products, probiotic supplementation, and cardiometabolic diseases: a systematic review and meta-analysis. Adv Nutr 11, 834–863.
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Dehghan M, Mente A, Rangarajan S et al. (2018) Association of dairy intake with cardiovascular disease and mortality in 21 countries from five continents (PURE): a prospective cohort study. Lancet 392, 2288–2297
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Bechthold A, Boeing H, Schwedhelm C et al. (2019) Food groups and risk of coronary heart disease, stroke and heart failure: a systematic review and dose–response meta-analysis of prospective studies. Crit Rev Food Sci Nutr 59, 1071–1090.